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Rapport de la Cour des comptes Maintenant que tout est dit, il faut agir !

jeudi 9 février 2017

Rapport de la Cour des comptes Maintenant que tout est dit, il faut agir !

La Cour des comptes vient de rendre son rapport public 2017 et y réserve une place de choix au Muséum.

Au-delà de quelques points et recommandations qui démontrent une connaissance légère de la réalité du Muséum, comme par exemple l’oubli de la diversité des missions accomplies par les enseignants-chercheurs, ce document livre et officialise des informations qui doivent donner matière à agir à la direction du Muséum.

Le Muséum est dans une situation financière catastrophique « en raison du déficit majeur engendré par des choix stratégiques imprudents »

Le rapport vient confirmer ce que SupAutonome-FO dénonce depuis plusieurs années : une dette structurelle créée par le mode de financement de la rénovation du Parc zoologique qui entraîne un déficit récurrent et une perte totale d’autofinancement de l’investissement pour le Muséum, un « nouveau modèle économique » fondé sur des budgets annuels insincères (cf. budget 2015) à base d’estimation fausse des recettes et des fréquentions, de désengagement de l’État, etc.

Aujourd’hui, les informations les plus alarmantes circulent sur l’état réel des finances du Muséum (difficulté à boucler l’exercice 2016, épuisement de son fonds de roulement). L’année 2017 sera également celle de la fin de la subvention d’investissement versée au Muséum.

La Cour des Comptes accable le Muséum mais « oublie » la responsabilité des tutelles dans les « choix stratégiques imprudents »

La Cour des Comptes évoque « la difficulté de l’établissement à se réformer en profondeur », mais elle oublie de préciser que le Muséum est depuis bientôt 20 ans sous tutelle et gestion directe par les ministères. S’il est une chose pérenne dans l’établissement c’est bien cela. Les décrets statutaires imposés par les tutelles (décret n° 2014-1107 du 1er octobre 2014 modifiant le décret n° 2001-916 du 3 octobre 2001) ont pour point commun d’avoir rendu minoritaires les élus du personnel au sein du Conseil d’administration et d’avoir mis en place un mode de désignation des dirigeants du Muséum à leur main.

Dans ces conditions, l’État ne peut pas dire qu’il ne savait pas. Non seulement il était au courant des décisions prises, y compris les plus hasardeuses (mode de financement du PZP, ouverture précipitée du PZP, illusoire autofinancement du Musée de l’Homme), mais il en a été l’acteur décisif. Ses représentants des ministères de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de l’Environnement, de la Culture, du Budget ont, au conseil d’administration, préparé et voté ces délibérations, dédaigné les observations et prises de positions des élus du personnel relevant l’extravagance de certains montages financiers.

La ministre de l’Éducation nationale reconnaît explicitement le rôle joué par les ministères dans la gestion directe du Muséum : « l’organisation systématique de réunions préparatoires (pré-CA) des délibérations du conseil d’administration du Muséum permet aux trois ministères concernés d’assurer sur l’établissement un contrôle administratif et financier efficient et d’apprécier de façon partagée la sincérité des prévisions et la soutenabilité des décisions présentées par son équipe de direction. » (p. 696)

Les réponses des ministères au rapport de la Cour des Comptes

Les réponses faites par les ministères de tutelle à la Cour des Comptes sont riches d’enseignements.

Comme à son habitude, la ministre de l’Environnement agit comme si l’établissement lui appartenait, se contente de 9 lignes de commentaire et ordonne face aux troupes au garde-à-vous : elle « partage les recommandations de la Cour » et « demande au Président du Muséum national d’histoire naturelle de les appliquer ». Fermez le ban !
Dans le même temps, via un décret, elle entend procéder à une découpe en règle du Muséum en lui retirant une part essentielle de sa mission d’expertise pour la confier à l’Agence française de la biodiversité (AFB), née un matin d’un caprice ministériel. Ainsi, alors que la loi confère explicitement et exclusivement au Muséum des missions, par exemple en matière d’inventaire de la biodiversité (exemple : article L411-1A du code du patrimoine), la ministre organise en ce moment le transfert de ces compétences à l’AFB.

La ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche moins prédatrice, apparaît plus honnête et gênée aux entournures, car consciente de l’implication de son administration dans la situation actuelle du Muséum. Pour autant, elle annonce clairement que ce sera au Muséum de se serrer la ceinture et que son ministère n’assumera pas toutes ses responsabilités.

La ministre de la Culture et de la Communication se montre plus prospective en insistant sur le rôle que le Muséum doit jouer comme Musée de France. Elle rappelle l’importance d’un projet scientifique et culturel, dont le Muséum n’est d’ailleurs toujours pas doté (!), et entend qu’il « exerce, dans son domaine de compétence, le rôle de Grand département patrimonial ».

Mais la palme de la franchise nonchalante revient au Secrétaire d’État au budget à propos du PZP : « le choix opéré en 2010 de recourir à un partenariat public-privé (PPP) s’avérera au final plus coûteux qu’un financement par subvention. Les décisions prises en 2010 impacteront l’équilibre de l’établissement pendant toute la durée du contrat de partenariat obligeant ainsi l’État à combler tout ou partie du déficit. Cet examen invite à encadrer fortement le recours à des montages financiers de type PPP. » Quel aveu ! Que ne l’ont-ils dit plus tôt ? Tout le monde aurait gagné du temps et de l’argent.

Courage, c’est l’heure des négociations avec les tutelles !

Paradoxalement, au-delà des effets d’annonce et des titres de presse, le rapport de la Cour des Comptes peut être pour le Muséum une opportune base de négociation avec les ministères de tutelle. Ce document vient s’ajouter à la liste de ceux sur lesquels le Muséum aurait déjà pu s’appuyer : contrat du financement du PZP qui prévoit explicitement que les ministères assument l’incapacité éventuelle du Muséum à payer la redevance annuelle, schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) adopté à la demande des tutelles en 2011 et dont elles se sont désengagées de fait dès 2012.

Quelques signes de saine gestion sont à adresser. Il convient de mettre un terme aux dépenses inutiles, celles qui n’ont en rien freiné la chute de la fréquentation du PZP (soirées boîte de nuit, patinoire, etc.), tout comme celles qui ne servent qu’à confirmer une situation connue de tous (cabinets extérieurs de consultants sur le PZP, sur la réorganisation, etc.). Il est aussi urgent de chiffrer et de limiter le coût de la réorganisation en cours du Muséum, qui va inévitablement grever le budget général (recrutements de directeurs, multiplication des échelons administratifs, aménagement de locaux, audits externes etc.) tout en augmentant les problèmes individuels au sein du personnel.

Mais, surtout, le Président du Muséum a le devoir d’agir, c’est-à-dire mettre les tutelles devant leurs responsabilités en leur demandant de respecter tous leurs engagements et de permettre au Muséum d’assumer les siennes, sans attendre les élections présidentielles et l’éventualité d’un changement d’interlocuteurs. Il y va de l’intérêt collectif, quelles que soient les vassalités.


Section SupAutonome-FO Muséum